samedi 22 août 2009

Glühend - 1


Glühend

1
21 décembre 2009. Je crois que pour ce dernier concert de l’année, je m’emportai un peu trop. J’étais littéralement électrifié. Pour moi, ce final au Velodrom de Berlin, c’était comme fêter toutes ces années de dur labeur, toutes ces années de succès grandissant – pas vraiment y mettre un point final, car notre tournée devait se prolonger l’année suivante, mais y mettre la cerise sur le gâteau. J’étais surexcité ce soir-là. Je ne tenais plus en place. Et je voyais que les fans aimaient ça. Les voir m’encourager à être encore plus frénétique était électrisant, presque galvanisant – embrasant. Oui, embrasant.
C’est bien le mot ! Ce soir-là, je me croyais littéralement invincible : mes groupies en pleine effervescence se battaient à mes pieds ; les mecs de l’équipe s’empressaient de m’apporter mes guitares elles aussi excitées ; même Flake me jetait des clins d’œil satisfaits de temps en temps, à moi qui pourtant communique peu en concert, et surtout pas quand je suis dans mon propre trip. En bref, ce concert avait commencé comme le meilleur des feux artifices, et j’étais fier d’en être l’une des plus pétillantes attractions.
Mais voilà ! il fallut que je m’approchasse trop près de cette putain de cheminée. Je les connaissais par cœur, nos effets pyrotechniques, pourtant – je savais toujours où et quand partirait le prochain feu d’artifice, où et quand le prochain lance-flamme s’enclencherait. C’était mon métier. Mon lot quotidien. Je suppose que ce soir-là, l’effervescence du public me contamina et j’en finis par oublier les règles élémentaires de sécurité. Par deux fois déjà, je faillis me brûler – sur Asche zu Asche, bien évidemment : je perdis légèrement équilibre juste avant de me rapprocher du micro ; sur Du riechst so gut aussi, quand je tentai une esquive près de l’arc de Till. Deux petits écarts qui poussèrent Till à venir me voir vite fait en coulisses pour me dire de me calmer. Un petit sermon de cinq secondes qui ne m’empêcha pas de devenir le spectacle incandescent sur Sonne, la chanson suivante.
Ma seule fierté : je devins littéralement le soleil de la scène pendant cette chanson. Ça, c’est clair ! Et j’avoue : je ne sais pas trop ce qui me prit. Je voulais m’essayer à un petit tour ; je voulais sauter par-dessus la cheminée qui se trouvait en face de moi juste avant qu’elle ne s’enclenchât. Je trouvais le tour impressionnant, et le public aussi. Mais je dus rater mon coup au deuxième refrain, car mon pantalon soudain prit feu. Sentant les flammes lacérer ma jambe droite, je tentai de les éteindre avec ma main mais c’est la manche de ma veste qui s’enflamma à son tour. Par un réflexe idiot, je mis ma guitare de côté pour la protéger, empoignant la sangle pour la passer par-dessus ma tête au plus vite, et ce faisant, je dus faire un faux pas, car je me sentis tomber en arrière. Mon bras embrasé se fracassa au sol sous mon poids et la douleur des os brisés se combina à celle de ma peau fumante. Paniqué à l’idée de ne voir personne accourir pour éteindre les flammes, j’essayai de me redresser et voyais autour de moi des fans hurler, les gars de la sécurité crier à notre équipe, arrivée sur la scène à peine trop tard.
J’étais tombé dans la fosse, dans le creux entre la scène et les barrières, où je cramais devant les yeux effarés de tous. Le temps que l’équipe redescendît avec les couvertures mouillées et les extincteurs, mon corps était déjà à moitié enflammé. Et je me souviens que tout ce que j’arrivais à faire, c’était me tortiller dans tous les sens en criant à l’aide.

Et puis, je dus m’évanouir car c’est le trou noir complet jusqu’à ce que je me retrouvasse sous une des douches en coulisses, Till me tenant par les aisselles et m’arrosant d’eau gelée en gueulant sur nos secouristes pendant que Paul, la main plaquée contre sa bouche, observait mes plaies de manière effarée, Schneider et Oli flanqués à ses côtés, et Flake me murmurant que tout allait bien.Pour moi, c’était une scène tirée de mes pires cauchemars. Ils paniquaient tous ; me le montraient plus ou moins clairement ; et j’avais mal ! Oh, tellement mal ! Dès que je repris assez mes esprits pour trouver mes repères, la douleur se fit intense, aussi aiguisée qu’une lame chauffée à blanc qui me tailladait la peau, qui me grattait les muscles, qui m’échauffait le sang déjà bouillant d’effroi. La douleur était pire qu’atroce : elle me coupa le souffle dès que j’ouvris les yeux, elle me lança de la stupeur en pleine gueule ; elle ne me laissa même pas une seconde de répit. Sous l’eau gelée, j’avais l’impression que mon corps carbonisait – et je me rendis compte que Paul gardait en fait la main contre sa bouche et son nez – ma souffrance m’empêchait de sentir la pestilence que j’étais devenu, mais je devinai – je devinai l’effroyable état dans lequel j’étais.
Et je criai. Je ne pouvais même pas me contrôler – la douleur s’était emparé de mes membres, et enclencha une réaction en chaîne, attaquant mon cerveau puis tout le reste de mon corps, tous mes muscles, tous mes organes, dont mes cordes vocales – et je criai donc, comme un porc qu’on égorge, comme un poulet qu’on étripe. Je criai à en mordre la main de Paul, qui avait répondu au « Fais-le taire ! » de Till en arrachant sa main de ses lèvres pour la mettre sur les miennes, et qui fut ébahi en voyant la marque de ma morsure sur sa peau.
Mais j’ai encore plus mal que toi, abruti ! J’ai maaaal !!!
Till me gifla plusieurs fois ; me prit face à face, son nez collé au mien ; insista pour que je me calmasse ; mais ses mots, qui se voulaient rassurants, s’évanouissaient avant d’atteindre mes tympans. Mon esprit était focalisé sur mes brûlures, et sa voix ne pouvait plus me toucher : je n’avais qu’une seule envie, et c’était de faire cesser cette douleur insurmontable !

Quand l’ambulance arriva, je me sentis encore partir. Till me secoua pour me faire reprendre conscience et pour émettre d’autres sons paternels que je n’écoutais pas. Je voyais sa bouche bouger au ralenti mais je ne le regardais même plus. C’est sur le brancard que je fermai à nouveau les yeux.
[impatient(e) de connaître la suite? allez: http://doomkrusmannders.blogspot.com/2009/08/gluhend-2.html ]

5 commentaires:

  1. Perso' même si c'est un peu glauque, je me demande ce que va donner la suite ! (:

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  2. Mon dieu, faites que ça n'arrive jamais réellement !
    En tout cas, je te dis chapeau bas car la manière dont tu as écrit ce premier chapitre est vraiment bien ! On ne s'ennuit pas un seul instant :D

    J'ai hâte de voir la suite !

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  3. Je suis tombée ici via ton blog sur Skyrock. J'ai commencé à lire ta nouvelle fiction par curiosité et au final je n'ai pas pu m'arrêter ! Tu écris vraiment bien, j'ai été prise dans ton histoire dès les premières lignes.
    Pauvre Richard, il doit vraiment souffrir le martyre ... C'est ça quand on veut faire son foufou sur scène XD !
    En tout cas, j'ai vraiment hâte de lire la suite ! :)

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  4. Super ta façon d'écrire j'attend impatiamment la suite ^^

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  5. Je viens juste de réagir, mais le début me fait penser à Hilf Mir...

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