samedi 9 mars 2019

Amaryllis - Epilogue


EPILOGUE


„Der Tod



ist ein König

mächtig und

allmächtig

mit Königin

doch ohne Garde

und zwischen seinen Beinen

pendelt eine Hellebarde

weiß nicht wohin er will

links   rechts

das Pendel gibt die Richtung an

weil er sich nicht entscheiden kann“

Till Lindemann, „Der Tod“

                Tout le monde est déjà là quand j’arrive à l’hôpital : Maja dans les bras de Schneider, visiblement en larmes, sous le regard timide de la mère d’Emil et de la sœur de Paul ; Olli agenouillé devant Hannah, qui est sagement assise entre Emil et Thomas – non, Tanja ; Flake debout à côté d’eux, murmurant quelque chose à Jenny et Lidja ; et Richard qui fume sa clope au bout du couloir, tout seul.
‘Till,’ m’accueille Flake. ‘Tu as fait vite.’
‘J’ai pris le premier avion.’
                Je jette un coup d’œil à chacun des enfants de Paul.
‘Comment ils encaissent ?’ marmonné-je à Flake.
‘Hannah est sous le choc et ne parle pas : Olli essaye de la rassurer depuis tout à l’heure ; Emil semble un peu déboussolé mais ça va ; par contre, Thomas… enfin, je veux dire : Tanja… comment dire ?… Elle a l’air désinvolte et choqué en même temps.’
‘Ils s’étaient disputés,’ rappelle Jenny. ‘Elle et Paul ne se sont pas revus depuis le départ d’Amy.’
‘Il – enfin, elle – doit se sentir un peu coupable…’ conclut Lidja.
‘Paul est dans un sale état ?’ demandé-je.
‘Toujours dans le coma aux dernières nouvelles. Avec un hématome sous dural, c’est normal,’ répond Flake d’un air sceptique.
‘Il y a toujours de l’espoir,’ insiste Jenny.
‘Là, je ne crois pas, non.’
                Les deux femmes gardent le silence. Je dévisage Flake.
‘Un hématome sous dural, c’est un choc au niveau du crâne qui crée une hémorragie importante,’ m’explique-t-il. ‘Si elle ne se résorbe pas d’elle-même, il faut opérer. L’ennui, c’est qu’il a fracturé sa colonne vertébrale avec la chute. Même si l’opération se passe bien, et même s’il sort du coma, ce qui serait déjà un miracle, il sera paralysé à vie. En plus, l’hématome est au niveau du cortex visuel… Il risque aussi d’être aveugle. Et tout ça, c’est si son cœur tient le coup.’
                J’acquiesce pour lui signifier que j’ai enfin compris. Au loin, Richard recommence à faire les cent pas en allumant une autre clope. Il a l’expression anxieuse qu’il affiche quand il se trouve face à un dilemme : pouce sur les lèvres, cigarette entre l’index et le majeur, regard complètement vide. Olli vient de prendre Hannah dans ses bras et lui caresse les cheveux tendrement, tout en pleurant lui-même, silencieusement. Maja et Schneider sont toujours dans leur coin à se consoler mutuellement. Enfin, je regarde Thomas – je veux dire, Tanja. Visiblement énervée. Ou dépitée. Ou les deux. Difficile à dire.
‘Et on a une idée de ce qui s’est passé ?’ ajouté-je.
                Lidja et Jenny baissent la tête.
‘Eh bien…’ commence Flake. ‘D’après la police, il aurait sauté de son balcon. Mais il n’a rien laissé derrière lui – aucune lettre… mis à part un…’
‘Quoi ?’
‘La police a demandé à Schneider s’il connaissait un certain T.L. car ils ont trouvé un mot signé de ces initiales dans son salon. Bien sûr, Schneider a pensé à toi tout de suite et il a demandé à voir le mot. La police le lui a juste montré, mais selon lui, le message n’était pas destiné à Paul.’
                Flake fait une pause pour me laisser répondre mais je ne dis rien.
‘En tout cas,’ reprend-il, ‘la police a conclu à la tentative de suicide quand Schneider leur a parlé de la séparation. Et comme les médecins ont trouvé un taux d’alcoolémie très élevé, ça semble concorder. La question, c’est pourquoi maintenant ? Je veux dire, ça fait au moins six mois qu’ils sont séparés !’
‘Il est allé voir Amaryllis.’
‘Tu es au courant de quelque chose alors ?’
                Je surveille Flake du regard. Je n’ai jamais aimé son côté un peu inquisiteur. Ça lui donne un air mesquin qui lui apporte toujours des ennuis.
‘Il est venu me voir hier pour me dire qu’il voulait se réconcilier avec elle. C’est tout.’
‘Et le mot ?’ insiste Flake.
‘C’est peut-être… ça doit être celui que j’ai écrit à Amaryllis il y a quelques jours,’ lui dis-je en évitant son regard perçant.
‘Je vois… Donc, il semblerait que Paul soit allé voir Amy aujourd’hui ; ils ont eu une explication, qui s’est mal passée pour Paul puisque Amy lui a donné ton mot. La question, c’est pourquoi elle aurait fait ça ?’ dit-il, plus pour lui-même qu’à moi, j’ai l’impression. ‘Tu avais écrit quoi ?’
‘Schneider te l’a pas dit ?’
‘A vrai dire, il a très vite évité le sujet quand Maja est arrivée.’
‘Mm.’
‘Alors ?’
‘J’aime pas quand t’insistes comme ça.’
‘Je sais.’
‘J’ai juste écrit que je regrettais ce qui s’était passé. C’est tout.’
‘Je vois.’
                Le chirurgien sort dans le couloir et nous explique que l’état de Paul est désormais stable. Ils ont tenté de minimiser l’hémorragie et le reste, je ne comprends pas vraiment. Du jargon d’hôpital. Au final, Paul va être transféré dans une chambre mais il est toujours dans le coma.
‘Il y a… des chances qu’il se réveille ?’ demande Schneider en se pinçant les lèvres.
                Je crois que je ne l’ai jamais vu avec un tel regard désespéré.
‘Pour être sincère, elles sont infimes. L’hémorragie s’est étendue au-delà du cortex visuel donc les dégâts peuvent être très graves. On a aussi dû le mettre sous respiration artificielle, ce qui n’est pas bon signe. Pour l’instant, son cœur tient le coup, mais à terme, cela pourrait ne pas suffire. Par ailleurs, on ne peut rien faire pour ses trois fractures.’
‘Celles à la colonne vertébrale ?’ demande Olli.
‘Oui. Trois fractures lombaires avec section de la moelle épinière. Malheureusement, on ne connaît aucune technique pour réparer ce genre de fracture. S’il se réveille, ce qui me semble, et je le regrette beaucoup, assez peu probable, il sera paraplégique.’
‘Ça veut dire quoi paraplégique ?’ demande la petite voix d’Hannah.
‘Eh bien, ça veut dire qu’il ne pourra plus marcher,’ lui répond le doc avec une voix compatissante au débit ralenti pour qu’elle comprenne mieux. ‘Vous pourrez le voir d’ici quelques minutes. Je suis vraiment désolé…’
                Je m’esquive pour rejoindre Richard quand le chirurgien passe au chapitre des condoléances.
‘Alors ? Qu’est-ce qu’ils ont dit ?’ me demande la voix anxieuse de Richard.
‘Il est comme mort.’
‘Mais non, c’est pas possible ! Je comprends pas : ils ont dit qu’il était encore en vie quand il est tombé. C’est – c’est que le choc ne pouvait pas le tuer ! Hein ? Hein ?’
‘Il est dans le coma.’
‘Donc il peut se réveiller ?’
‘Mouais, c’est possible. Mais s’il se réveille, il sera paralysé.’
‘Oh non… merde !’
                Richard se cale le dos contre le mur, abattu, le regard voilé.
‘Mais pourquoi il a fait ça, ce con ? Pourquoi ?!’ soliloque-t-il.
                Du coin de l’œil, je vois Thom– Tanja nous rejoindre.
‘Alors ?’ demande encore Richard, sans qu’aucune réponse ne soit donnée. ‘Il peut pas mourir, il peut pas mourir…’ se répète-t-il en secouant la tête.
‘Mais il a le cerveau en compote !’ lui lance nerveusement Tanja.
                Richard la dévisage, stupéfait d’être attaqué ainsi.
‘Désolée… c’est juste que… ça fait beaucoup d’un coup…’
‘Oui, c’est normal, c’est ton père. Ça doit être dur pour toi. Mais il faut garder espoir !’ lui sort Richard en allant lui tapoter l’épaule.
‘Arrête, s’il te plaît.’
‘D’accord,’ lui dit Richard en s’exécutant, un peu penaud.
                Tanja s’approche de la fenêtre et Richard me regarde, comme si je détenais la réponse au comportement lunatique de Tanja.
‘Thomas ? Je peux te demander quelque chose ?’ commencé-je.
                Il– Elle ne bouge pas. Richard me regarde en fronçant les sourcils.
‘Je veux dire : Tanja ?’
‘Quoi ?’
‘T’as des nouvelles d’Amaryllis ?’
                Ma question est suivie d’un silence glacial.
‘Où est le rapport ?’ me murmure Richard, visiblement intrigué à la fois par ma question incongrue et la résignation de Tanja, qui finit par se retourner vers nous.
Ce qu’elle me dit, à moitié étouffé dans un sanglot, me scie en deux :
‘Amy est décédée. Renversée par un bus le week-end dernier. Je suis allée à son enterrement hier.’
‘Oh, mince…’ s’exclame Richard. ‘C’est vraiment pas de chance, ça. Deux malheurs d’un coup, c’est…’
                Richard lève le regard vers moi.
‘Till, ça va ?’
‘Mm.’

***

                Les jours suivants défilent comme si je n’étais que figurant d’une pièce de théâtre que j’aurais écrite. Je ressens le découragement de l’auteur bafoué ; la résignation de l’écrivain spolié qui voit sa pièce jouée médiocrement devant deux ou trois péquenauds.
                Chacun y va de son avis sur ce qu’il faut faire pour Paul, et moi, je n’arrive tout simplement pas à y croire. Je suis pourtant quelqu’un de terre à terre. Je sais bien que les réactions de chacun sont tout à fait compréhensibles à défaut d’être logiques ; la peine est un monstre qui nous extorque les pires décisions. Mais la mienne, celle de garder le silence, est probablement la moins comprise de tous.

On est tous réunis dans la chambre blanchâtre de Paul, tous postés autour de son lit, moi dans un coin. Paul a l’air d’aller – si ce n’est qu’il a le crâne rasé, avec un pansement dessus, et un énorme tuyau dans la bouche qui l’empêche de sourire. Il a l’air bien tranquille ainsi. Comme apaisé. Mais il ne bouge pas, et ne bougera plus jamais. Lui qui était pourtant quelqu’un de vif, toujours à gigoter, ou à faire en sorte qu’on se bouge le cul quand on faisait face à un problème ; lui qui, même à cinquante balais, continuait de courir, de sauter, de se casser la gueule, comme un gamin dans un parc ; lui qui ne supportait pas l’idée de stagner, et ne le faisait que lorsqu’il était au plus mal, le voilà immobile, allongé sur un lit d’hôpital. Mort.
Le médecin discute avec Emil et lui explique l’importance de la décision qu’il doit prendre avec Tanja. Cette dernière n’a pas hésité une seconde quand le médecin a fini son speech. Elle a gardé les bras croisés et elle a lancé dans un silence morbide :
‘Débranchez-le alors ! Il est déjà mort de toute façon.’
‘Ecoute, faut… faut pas prendre cette décision… à la légère…’ se défend Emil, aux côtés de Schneider qui acquiesce pour l’encourager.
Emil se tourne à nouveau vers le médecin.
‘Vous… vous êtes vraiment sûr… qu’il… qu’il n’y a pas d’esp…’
‘On n’est jamais sûr de rien,’ lui répond le doc. ‘A vrai dire, le cerveau est l’organe que nous connaissons le moins. Il est assez imprévisible. Mais disons qu’en l’état actuel des choses, ses chances de se réveiller sont infimes. Et comme je vous l’ai dit, s’il se réveille, nous ne pourrons rien faire contre sa paralysie et sa cécité. Comme je ne peux pas vous garantir qu’il se réveillera dans quelques jours, ou même dans quelques années, et que les dommages au cerveau peuvent être encore plus graves encore que ceux que nous avons identifiés au scanner, je ne peux que vous conseiller de prendre cette décision pour vous. C’est à vous de voir si vous préférez faire votre deuil maintenant, ou… si vous voulez attendre.’
                Evidemment, les avis sont partagés. On dirait que Maja, Schneider et Lidja préfèrent croire aux miracles. Mais Flake a rameuté Olli, Jenny et la soeur de Paul à sa cause plus sceptique. Selon lui, « ce que l’on fait subir à Paul depuis des jours, c’est de l’acharnement thérapeutique pur et simple. » Richard vote blanc : il est plongé dans ses pensées oppressantes et personne n’arrive à l’en sortir. Tanja signale qu’elle a déjà voté, et Hannah regarde chaque acteur donner son argumentation sans qu’on lui laisse la parole. Pauvre petite. Les larmes me montent aux yeux quand je la vois ainsi, au centre de l’arène, la main fermement accrochée aux doigts de Paul.
‘Till ?’
‘Mm.’
                Je ne sais même pas qui m’a appelé.
‘T’en penses quoi ?’ me demande Emil d’une voix désabusée.
                Tout le monde me fixe de leur regard inquisiteur, presque accusateur. Je prends une grosse inspiration comme pour plonger :
‘Ton père a fait un choix ; il avait ses raisons. C’est vrai que c’est difficile à accepter mais c’est comme ça.’
                Schneider est outré par ce que je viens de dire et repart dans son discours moralisateur, d’autres argumentent l’idée peu commune que Paul ne voulait pas se suicider, qu’il est évident que ce n’était en fait qu’un accident, mais Emil les arrête dès que le prénom d’Amaryllis survient pour réveiller Richard de sa torpeur.
‘Richard ?’
‘Hein ?’
‘T’en penses quoi ?’
‘Oh ! Heu…’
                Richard me regarde comme un collégien qui a perdu ses anti-sèches et qui cherche la réponse sur la copie du voisin.
‘Je ne sais pas…’ hésite-t-il. ‘Non, franchement, j’en sais rien. Désolé.’
                Richard sort de la chambre sans demander son reste. Le clan Schneider me lance des éclairs, et celui de Flake a l’air honteux de me compter parmi ses membres.

C’est vrai. C’est de ma faute. Du début jusqu’à la fin. Si je n’avais pas autant merdé comme ça, Amaryllis serait en vie – peut-être. Et Paul ne serait pas ce légume pour la dignité duquel tout le monde prétend se battre. Il faut croire que tout ce dont je suis capable, c’est de tomber amoureux de la mauvaise personne – à chaque fois dans une configuration différente, donc à chaque fois en succombant à la tentation interdite – et au lieu de trouver une solution au merdier que je laisse derrière mon passage, je me contente de regarder les autres recoller les pots cassés sans les prévenir quand ils se trompent de morceaux.
Je suis comme un vieil ours qui, quand il fait une bêtise, se cache tout au fond de sa tanière où il espère qu’on l’oubliera – et quand il en ressort enfin, les problèmes ont décuplé et on lui reproche de ne toujours pas avoir d’explications à fournir.

Au final, Emil rejoint la décision de Tanja et chacun entreprend de faire ses adieux – en silence pour la plupart, en serrant une des mains du mort. Schneider ne peut pas s’empêcher de sangloter en embrassant le front de celui qu’il considère toujours comme son meilleur ami. Hannah pose sa tête sur le torse de son père et insiste pour qu’il n’oublie pas d’aller dire Bonjour à ses grands-parents et à Amaryllis quand il sera « là-bas, » cet au-delà auquel il ne croyait pas – auquel je ne crois pas non plus.
‘Je sais que tu t’en fiches mais c’est important, alors t’oublies pas,’ ajoute-t-elle en pointant son index vers son père. ‘Bien.’
                Emil se contente d’un « Tu vas me manquer, Papa » enroué et difficile à sortir. J’avoue que les mots me manquent quand vient mon tour. Je me contente d’acquiescer en approbation d’une fatalité qui, pourtant, me déchire le cœur et je laisse vite ma place à Tanja, qui se baisse et murmure à l’oreille de Paul :
‘Je te pardonne.’

***

                Paul n’ayant fait part d’aucune dernière volonté, ni écrit de testament, Emil a choisi de suivre l’idée de Tanja, qui était d’enterrer Paul auprès de la tombe d’Amaryllis. Ce n’était visiblement pas au goût de la meilleure amie, restée à l’écart lors des funérailles. Intrigué par la jeune femme furibonde, j’ai demandé au type à qui j’avais laissé ma lettre pour Amaryllis et qui m’a visiblement reconnu, quel était son nom.
‘Gaïa.’
‘Comme la déesse grecque ?’
‘Oui, c’est ça,’ m’a-t-il confirmé en souriant faiblement.
                Je suis allé la rejoindre discrètement.
‘Bonjour, je m’appelle Till.’
‘Ouais, ouais, je sais : j’ai reconnu ta tête sur un de ses livres.’
‘Ah. Je suis un ami de Paul.’
‘Oui, j’avais compris ça aussi.’
Elle était bien furax, la fille. Je lui ai demandé sans passer par quatre chemins pourquoi elle n’a pas fait rapatrier le corps d’Amaryllis en France.
‘Sa famille est dispersée un peu partout – et personne n’habite près du tombeau familial.’
‘D’accord, je vois.’
‘Alors j’ai proposé à sa sœur aînée de l’enterrer ici. Ça lui a convenu. C’est la seule, avec un des frères, qui a pu faire le déplacement pour l’enterrement et récupérer ses affaires.’
‘Et… heu…’
‘Myalis ?’
‘Oui.’
‘Je l’ai confiée à sa sœur. Je voulais pas que ce connard ait sa garde ! Maintenant, c’est pratique : il peut pas la réclamer. Et puis, selon Tanja, c’est pas son frère Erni…’
‘Emil.’
‘Ouais, c’est ça, Emil, qui ira râler non plus. Et c’est tant mieux parce que vu comment il joue les chochottes éplorées…’
                J’avoue que ça m’a fait bizarre de me retrouver face à quelqu’un qui rejetait en bloc la faute de la mort d’Amaryllis, pourtant accidentelle, sur le dos de Paul. Pas sur moi. Pourtant, il n’y a qu’un ermite égoïste comme moi qui peut foutre en l’air une relation idyllique et sonner le glas pour les deux amoureux. D’après tous les autres, c’est moi le fautif dans le drame. On ne me le dit pas, mais je le sens. D’après Gaïa, non.
C’est comme si elle voyait la situation à l’envers : Paul en trouble-fête dans le couple Amaryllis/Till. Selon elle, Amaryllis m’aimait inconditionnellement – elle m’avait toujours admiré plus que quiconque au monde, et les sentiments qu’elle avait envers Paul n’étaient inspirés que par la compassion. J’aimerais me bercer dans cette illusion, mais même en voyant les choses ainsi, le remords ne me lâche pas. Il prend seulement une nouvelle ampleur. Il se fait plus acéré. Plus tranchant.
                Je n’ai pas fait l’erreur de sous-estimer l’amour de Paul envers Amaryllis – je me suis juste repris trop tard pour lui éviter la mort. Par contre, j’ai complètement sous-estimé celui d’Amaryllis envers moi. J’ai fait cette erreur stupide – sage, mais stupide – de croire qu’elle pouvait m’oublier quand moi-même, je me refusais cet effort ; qu’elle pouvait me pardonner mes écarts quand moi-même n’aspirais qu’à les réitérer.
                Je l’ai crue plus forte qu’elle ne l’était. J’ai oublié qu’elle était aussi fragile qu’une fleur, au pied de laquelle Paul est tombé – comme une abeille empoisonnée.

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Ceci est la fin de la fanfiction Amaryllis. Il existe une nouvelle dont l'action se déroule 14 ans après. J'avais envisagé de l'intégrer à cette fiction mais en réalité, la démarche est fondamentalement différente. Le ton, le thème abordé, la caractérisation des personnages forment un tout qu'il m'est impossible de modifier pour coller à la fiction d'origine. Elle reste donc une nouvelle à part, fondée sur le même univers, qu'on peut trouver ici. 

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