XIX – Sombre silence
‘Savoir
souffrir
En silence sans murmure
En silence sans murmure
Ni défense
ni armure
Souffrir à vouloir mourir
Se relever
Comme on renaît de ses cendres
Avec tant d’amour à revendre
Qu’on tire un trait sur le passé…’
Souffrir à vouloir mourir
Se relever
Comme on renaît de ses cendres
Avec tant d’amour à revendre
Qu’on tire un trait sur le passé…’
Florent
Pagny et Pascal Obispo, ‘Savoir aimer’
Six mois plus tard…
Ce
n’est qu’un poème – ce n’est pas ce qu’il pense vraiment. Ce n’est pas ce qu’il
pense de moi – ce n’est pas ce qu’il pense de tout ça. Ce n’est qu’un poème…
Il
n’était pas arrivé par la poste. C’est Gürt qui me l’a donné dans une enveloppe
scellée, sans adresse, en disant qu’un homme était passé pour demander quand je
faisais mon numéro.
‘Je lui ai répondu que tu étais en congé et ça n’avait
pas l’air de le surprendre.’
‘Il était petit, cet homme ? Avec des yeux
gris-verts, une coupe de cheveux bizarre et un sourir…’
‘Non.’
Gürt
semblait peiné pour moi. C’est sûrement la déception qui se lisait sur mon
visage. Même si je n’avais pas oublié le geste de Paul, même si je répétais ne
pas être prête à pardonner, une partie de moi, la part irrationnelle que je
congédie si souvent, souhaitait secrètement le revoir. Mais comme toujours avec
moi, la part rationnelle, celle qui m’évite l’engrenage de la relation toxique,
cette part l’emportait pour me mener bien loin, dans une forêt de solitude bien
sombre.
‘Non. Il était grand, très large, aux yeux bleus et
mal rasé. Un air peu recommandable. C’est la première fois que je le rencontre.’
‘Ah…’
‘Je suis vraiment désolé pour toi, poulette.’
‘Ce n’est rien.’
Sceptique,
j’ai retourné l’enveloppe mais il n’y avait rien de griffonné au dos non plus.
‘Tu devrais aller le voir – lui montrer sa fille…’ a-t-il
encore commencé.
Toujours
le même sujet – toujours le même silence de ma part.
‘…il regrette peut-être mais n’ose pas te le dire,
qui sait ?’
Mon
mutisme n’est pas une solution ; il me confère un orgueil déplacé sûrement,
mais il reste l’unique réponse qui ait encore du sens.
‘Je suis sûr qu’il t’aime toujours – c’est juste qu’il…’
‘Il croit que je ne l’aime pas, et c’est aussi bien
comme ça.’
Ma
froideur étonne même mes amis proches. C’est le seul bouclier que j’ai trouvé
pour m’empêcher de me liquéfier, de fondre dans la fournaise de ma culpabilité.
Voiler mes sentiments derrière ce masque impassible – voilà ce qui m’a toujours
sauvé de mes propres folies. Remède radical face à un mal impardonnable dont on
croit être l’origine : il m’a frappée ; je l’ai trompé ; il buvait
trop ; je le maternais trop – on peut ainsi remonter loin dans un cycle
perpétuel de culpabilité. D’ailleurs, suis-je vraiment coupable ? Est-on
fautive quand on fait bêtement confiance au mauvais type ? Les questions s’enchaînent ;
les réponses sont introuvables. Si mon silence peut m’empêcher de me taillader
les veines, c’est tout aussi bien.
J’ai
posé l’enveloppe sur la table basse et me suis refait un thé – à peu près tout
ce que je peux avaler en ce moment. Myalis somnolait sur mon canapé. Elle ne fait
pas ses nuits correctement – elle aspire mon anxiété, me dit Gaïa, meilleure mère
de substitution que je l’aurais crue. Elle me la prend les nuits où je ne trouve
pas le sommeil à cause de mes crises d’angoisse – ou à cause des pleurs de
Myalis, qui pressentent toujours mon mal-être. Les bébés sont très forts pour
ça : ils sucent l’anxiété qui transpirent de votre corps à chaque tétée,
et leurs cris ne font qu’amplifier cette anxiété – cercle vicieux irrémédiable.
Au final, ils comprennent le problème plus vite que vous et refusent de téter.
Et une autre culpabilité, celle de ne pas être capable d’allaiter son enfant,
s’ajoute au regret qui entoure une absence qu’il ne comprend pas encore mais
reprochera toujours : celle du père.
C’est
exactement ma plus grande peur, celle à laquelle je ne devais surtout pas faire
face, celle qui surpasse toutes mes phobies : avoir un enfant sans père.
Au-delà même d’une simple appréhension, c’est l’erreur que je n’ai jamais pu
pardonner à ma mère – et c’est maintenant l’erreur que j’ai reproduite bêtement.
Prévisible ou pas, c’est la faute ultime à mes yeux. Au-delà même de mon viol,
c’est le malheur qui ne devait surtout pas m’arriver car c’est celui de devenir
le bourreau de quelqu’un d’autre. Ma crainte suprême. Savoir que je suis trop faillible
pour élever seule le fruit d’un amour disparu. Savoir qu’un faux pas avec l’homme
que je devais aimer pour le bien-être du bébé, m’a déjà coûté le respect du père
et de l’enfant.
C’est
la peur de se détester, oui.
Je
retourne m’asseoir auprès de Myalis et tombe en contemplation apathique. Ça
m’arrive souvent depuis quelques temps. Je la regarde dormir, puis au bout de
ce qui m’a semblé deux secondes, je constate que deux heures se sont écoulées.
C’est bien navrant, je vous l’accorde.
Ce
soir-là, l’enveloppe anonyme a très vite attiré mon regard. Je me doutais bien de
l’identité de celui qui l’avait apportée – des hommes grands et musclés qui
préfèrent sortir leur plume pour s’exprimer, je n’en connais pas des masses. J’ai
saisi la lettre et l’ai manipulée devant mes yeux, à la recherche d’un quelconque
signe de la part de son auteur. J’ai souri. J’ai reconnu la minutie de Till dans
la disposition du scotch – deux morceaux de même longueur qui partaient chacun
d’un côté de l’enveloppe pour se rejoindre au milieu, sans se superposer.
J’avais souvent souri en imaginant Till et ses gros doigts en train de calculer
la longueur nécessaire de ruban adhésif pour sceller ses enveloppes. Mon
imagination était même allée jusqu’à le voir pincer les lèvres et froncer les
sourcils à son bureau – et l’image de ce grand garçon soigneux était restée imprimée
sur mes synapses pour accompagner mes rêves interdits. C’est étrange, la
manière dont on peut fuir une impasse pour se jeter au fond d’un autre précipice,
sous prétexte que l’alternative paraisse envisageable.
J’ai
arraché l’enveloppe et commencé à lire le mot que Till avait écrit :
« Quelques gribouillis pour dire combien je
regrette. Le souvenir de tes griffures devait disparaître de ma peau mais il
reste gravé dans ma mémoire. J’espère te revoir un jour, même au bras de mon
rival. En attendant, voici un petit cadeau pour toi. T. L. »
Mes
griffures… C’est donc tout ce dont il se souvient de moi. Notre unique nuit lubrique.
Décidément, les hommes sont tous pareils !… A moins que griffures incluent
aussi les gribouillis épistolaires de chacun…
Amaryllis
(5)
Die Bienen lieben Blumen
Aber nicht Rosen, nicht Flieder
Sie wollen die Eine immer
Sie wollen die Hoheit
Sie entwurzeln ihre Schönheit
Jedes Blütenblatt gezogen
Um ihren Duft zu essen
Ihre Würde zu vergessen
Die Bienen ärgern sich
Wie gewöhnlich
Fressen sie sehr gern
Dann fliegen weg in die Ferne
Und lassen sie ganz alleine
Unversehrt nur ihre Beine
|
Amaryllis
(5)
Les
abeilles aiment les fleurs
Mais pas les
roses, pas les lilas
Elles
veulent toujours l’unique
Elles veulent
son Altesse
Elles arrachent
sa beauté
Chaque
pétale déraciné
Pour manger
son parfum
Pour oublier
sa dignité
Les
abeilles s’énervent
Comme
d’habitude
Elles se régalent
Puis elles
s’en vont loin
Et la laisse
toute seule
Seules ses
jambes d’intactes
|
Après une autre de mes torpeurs, où les évènements s’enchaînent dans la
confusion d’une ivresse sans alcool, où le doute fait craqueler la mémoire
comme la sècheresse une terre pourtant fertile, je relis ce poème. Sans surprise, je regarde
mes jambes. Que veut-il dire par là ? Qu’après avoir été la proie des
abeilles, je me suis retrouvée avec seules mes jambes d’intactes ? Mais
pourquoi mes jambes ?
Je peux passer des heures à me
focaliser sur un détail idiot pour comprendre un éventuel sens caché à un
texte. Après tout, le mot jambe en allemand ressemble au mot abeille. C’est
peut-être ça, la raison… Non. Pourquoi les jambes et pas le tronc du corps – ce
serait plus logique. Voyons… On marche avec des jambes. On court aussi. On fuit
un danger – un violeur – son sauveur. Comme j’ai fui Paul la première fois qu’il
m’a vue… Non.
On
danse. J’ai compris, et je soupire de dépit en froissant la feuille sur laquelle
il a imprimé son poème. Je la jette par terre. La boule de papier s’en va sautiller
jusqu’au rideau de ma chambre. Je ne suis donc qu’une fleur que les abeilles ont
sauvagement butinée et qui finit par revenir à son cabaret miteux pour y faire
tout ce que ses jambes lui permettent encore de faire : danser pour le bon
plaisir de ces abeilles. Est-ce donc seulement cela ? Till manque décidément
de tact.
Myalis
se réveille et me réclame. Je lui offre mon sein en pâture, mais cette fois encore,
je n’ai pas de montée de lait. Je m’en vais toquer à la porte de Gaïa mais au
bout de la troisième tentative sans réponse, je comprends qu’elle travaille ce
soir. Je retourne donc dans mon appartement, tente de bien doser le biberon
sous les cris déchirants de Myalis, puis le lui donne en m’asseyant au bord de ma
fenêtre pour observer les passants. Une large silhouette en long manteau noir est
postée devant une vieille affiche du cabaret, les pieds enfouis dans la neige.
Un rôdeur sûrement.
Je laisse mes yeux suivre
une vieille mémé traînant son caddie rempli de babioles diverses, son chat à la
fourrure défraîchie endormi sur la montagne de canettes. Puis le rôdeur croise
à nouveau mon regard. Le sien est dirigé vers moi. Il s’est écarté de l’affiche
qui reflète mon ancienne gloire pour s’approcher du bâtiment. Il a un visage dur
et marqué, une tête de psychopathe – mais des yeux bleus étincelants – familiers.
On dirait Till avec les cheveux courts – et presque blancs. Je me lève instinctivement,
le cœur battant la chamade comme s’il voulait me prévenir d’un grand danger.
J’ai baissé le biberon sans faire exprès et Myalis gueule pour réclamer son
lait. L’homme en noir a penché la tête sur le côté et froncé les sourcils. Je
ne peux pas admettre qu’il soit Till. Il lui ressemble trait pour trait, c’est
certain. Mais mon instinct de survie m’oblige à croire que ce n’est qu’un sosie,
jusqu’à ce qu’il lève la main droite comme
pour saluer, sans l’enthousiasme qui s’accompagne d’un sourire aux lèvres. On
dirait plutôt un signe indécis – un bonsoir qui s’efface très vite : il a
à peine commencé à remuer les doigts que sa main est déjà enfouie dans sa poche.
Je lève à mon tour la main pour répondre mais le biberon cogne contre la vitre
puis m’échappe des mains.
‘Merde…’
Je
me baisse pour rattraper le biberon qui a roulé sous un meuble, Myalis toujours
hystérique dans mes bras, et quand je le trouve enfin pour lui redonner la tétine
à sucer, je cours à la fenêtre pour découvrir que le rôdeur a disparu. La déception
me gagne. Un rôdeur qui ressemble à ce point à Till et qui me fait signe, ça
n’existe pas.
C’était donc Till.
***
Quand
je couche Myalis, l’évidence se fait claire. J’ai toujours le cœur coupé en
deux. Une part est à jamais dédiée à Paul malgré son geste, et l’autre a été volée
à mon insu ; elle palpite au souvenir de Till, qui m’obsède encore plus
quand je tente de le mettre à la porte de mon esprit. Fatalité insoutenable –
même si je pouvais oublier son coup de poing, et cette fureur explosive qui l’a
saisi un instant, un instant de trop en ma présence, je ne pourrais pas avoir
une vie normale avec Paul. Mon cœur continue à jouer les schizophrènes. Je ne
serais pas seulement une épouse indigne pour Paul, assez martyrisé comme ça. Je
cultiverais aussi une situation malsaine à laquelle Till lui-même ne semble pas
être capable de mettre un terme. Il dit qu’il regrette – regretter mes propres
fautes, quelle absurdité ! – mais que le souvenir de mes griffures devait
disparaître de sa peau. C’est donc le devoir qui le motive à corriger ses
actes, mais pas assez pour m’effacer de sa mémoire. Il restera toujours une faille
potentielle. Il ne sera jamais l’homme fort qu’il incarnait.
En
même temps, ce verbe « devoir » harcèle aussi beaucoup trop mon
discours. J’aime Paul parce que je le dois. Il a été un homme formidable pour moi.
Un homme qui a assumé ses failles. Un homme qui a su souffrir pour moi. J’ai
bien quelques bons souvenirs de lui : ses petites rides au coin des yeux
qui s’étiraient et se multipliaient au fur et à mesure que son sourire s’élargissait ;
ses mille excuses quand il ne se sentait pas à la hauteur de mes attentes sexuelles,
toujours plus avides, toujours plus frustrées ; la fois où je l’ai surpris
en train de prendre des cours particuliers de salsa en cachette pour m’épater ;
ou encore celle où il a pris un air tout penaud pour me supplier de lui faire
un striptease ; et puis tous les matins où il me réveillait en caressant
chacun de mes tatouages, toujours avec délicatesse, toujours avec tendresse. De
bons souvenirs que j’ai brisés comme lorsqu’on balance de la vaisselle par la
fenêtre ou sur l’homme qu’on aime. De bons souvenirs qui doivent me forcer à
l’aimer en retour…
Or, l’amour ne se doit pas.
Je m’effondre
encore une fois. Mon orgueil est bien bancal. Pour quoi avoir tout brisé ?
Pour une vulgaire nuit dans les bras de Till ! Oui, je me hais ! Je me
hais d’avoir succombé comme la première des gourdes ! Je me hais d’être
incapable, encore aujourd’hui, d’arracher ce cœur qui palpite à demi-mesure – de
sectionner la partie ingrate qui refuse d’aimer comme l’autre. Mais pourquoi ?
Pourquoi fallait-il que les choses se déroulent ainsi ? Pourquoi fallait-il
que je tombe amoureuse de l’homme que je n’admirais pas ? Et pourquoi
fallait-il que l’homme que j’admire se mette à m’aduler en secret comme un fruit
défendu ? Pourquoi ?
Mon
miroir glisse de la table et se fracasse au sol. Je n’avais même pas remarqué
que j’étais en train de le marteler depuis tout à l’heure, le front collé
contre mon reflet hideux, les larmes creusant leurs sillons habituels sur mes
joues livides, certaines s’arrêtant net au bord de ma cicatrice – au bord des
petites amaryllis…
Les
débris s’éparpillent à mes pieds et démultiplient ma chambre en morceaux.
J’entends les cris apeurés de Myalis derrière moi mais son alarme ne m’éveille
pas de ma torpeur. Je m’agenouille devant les bouts de verre, en saisis un de
taille moyenne, l’approche de mes yeux comme une pépite d’or que j’aurais
découverte. Je me dis que ça risque de faire beaucoup de sang, que mon côté
maniaque préfère quand tout reste propre, avant de reposer le morceau de verre
parmi les débris et d’aller chercher le balai et la pelle.
Et
je crois que je m’endors. Je dépose doucement Myalis sur les draps de mon lit.
Instinctivement roulée en boule, elle semble se protéger du danger qu’est sa
mère, déjà repartie dans la cuisine pour écrire une lettre – pour Gaïa. Puis
une deuxième – pour Gürt. Et encore une pour ma sœur, une pour Paul, une pour
Till. Les mots ont toujours facilement glissé de mon stylo, avais-je répliqué,
quand Till s’étonnait de la longueur de mes nouvelles.
Les
lettres n’ont pas de contenu. Elles sont toutes recueillies ensemble, et je les
laisse à Gaïa, dans un PS lui confie le soin de transmettre chacune d’elles à
son destinataire. Ensuite, je m’en vais ouvrir la fenêtre – je passe une jambe
par-dessus le rebord – puis l’autre. D’un coup de reins, mes fesses glissent du
mur – et je tombe.
Au moins, j’aurai su braver
une de mes peurs – mon acrophobie – et je n’aurai pas sali l’appartement non plus,
juste le trottoir.
Mais
juste avant de me fracasser au sol, je me réveille systématiquement en sueur de
ce cauchemar, cauchemar qui ferait mieux d’être réel pourtant. Or, je suis soit
trop lâche, soit trop raisonnable pour me suicider. Prendre un de mes couteaux
de cuisine semble quelque chose de si simple à réaliser – mais les mêmes questions
rationnelles viennent toujours tambouriner à mes tempes : qu’adviendrait-il
de Myalis ? Je devrais peut-être me renseigner pour savoir si ma meilleure
amie pourrait s’occuper d’elle en cas d’accident – on ne sait jamais :
suis-je vraiment à l’abri de la folie ? D’ailleurs, que penserait ma
famille de moi ? Ils ne comprennent toujours pas pourquoi je préfère
rester à Berlin, si loin d’eux, alors que je n’ai plus aucun engagement ici. Il
faudrait que je pense à leur écrire. Et puis, la question me semble incongrue,
que penserait Paul de moi, surtout ? Il croirait que j’ai délibérément choisi
de l’abandonner – lui qui me répétait qu’il ne s’imaginait plus vivre sans moi…
A croire que de telles paroles n’ont aucun sens ; elles s’envolent bien facilement
lorsque le serment se brise derrière…
Gaïa
frappe à ma porte pour me rappeler que j’avais prévu de faire les courses ce matin.
Je regarde ma montre : en effet, c’est déjà le matin. Je lui laisse
Myalis, attrape mon manteau et mon sac dans ma chambre puis trébuche sur une
boule en papier. Je la ramasse et la déplie pour me rappeler ce que c’est. Les
mots de Till me frappent à nouveau en plein cœur et je choisis de glisser la
feuille furtivement dans ma poche.
‘Je
reviens vite,’ dis-je machinalement.
‘Pas
de souci,’ me répond Gaïa, déjà occupée à vérifier si j’ai bien changé la
couche de Myalis.
Une
fois sur le trottoir, j’entame ma promenade mécanique vers le magasin, les
pieds foulant la neige fondue, la tête baissée. Que serais-je sans la
bienveillance de Gaïa, me dis-je, avant de ressortir le poème de Till, me plongeant
dans sa relecture. Ce n’est qu’un poème – ce n’est pas ce qu’il pense vraiment.
Ce n’est pas ce qu’il pense de moi – ce n’est pas ce qu’il pense de tout ça. Ce
n’est qu’un poème…
“[…] then reproaching herself for having
taken no leave,
making no acknowledgment, parting in apparent sullenness,
she looked out with voice and hand eager to show a difference;
but it was just too late.”
making no acknowledgment, parting in apparent sullenness,
she looked out with voice and hand eager to show a difference;
but it was just too late.”
Emma, Jane Austen
Il
faut croire que j’ai oublié de regarder avant de traverser la rue, ou que la
chaussée était impraticable. Un bus m’a fauchée de plein fouet.
“Never had she felt so agitated, mortified,
grieved at any circumstance in her life.
She was most forcibly struck.
The truth of his representation there was no denying.”
grieved at any circumstance in her life.
She was most forcibly struck.
The truth of his representation there was no denying.”
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